Produits industriellement depuis environ 1930, les polychlorobiphényles (PCB) ont été utilisés dans une large gamme d’applications, notamment les gros équipements électriques tels que transformateurs et diélectriques, jusque vers la fin de la décennie 1980. Depuis 1987 en France, comme dans les autres pays industrialisés, toute production est interdite et les équipements déjà en service devaient être éliminés au plus tard au 31 décembre 2010. Les restrictions d’usage puis les interdictions sont intervenus au fur et à mesure de la prise en considération de l’accumulation des PCB dans les chaînes alimentaires et de leur toxicité, complexe et partiellement similaire à celle des polychlorodibenzodioxines. En France, la découverte d’une contamination de poissons d’eau douce dans le Rhône vers 1985-1986 a eu entre autres conséquences de mettre en place une valeur-guide de 2 mg.kg-1 (poids frais) pour l’ensemble des PCB dans la chair des poissons. La surveillance des poissons du Vieux Rhône de Miribel sous l’égide du Service de la Navigation Rhône-Saône a perduré jusqu’en 1999, où il a été constaté que ce niveau guide de 2 mg.kg-1 était respecté. En 2005, la découverte fortuite de deux brèmes contaminées par les PCB dans le plan d’eau du Grand-Large et l’avis de l’AFSSA(devenue ANSES, Agence Nationale de Sécurité Sanitaire en 2010) concluant à un risque possible pour les consommateurs, a conduit par paliers à un diagnostic étendu à l’ensemble du linéaire du Rhône, puis ses affluents, ainsi que sur l’ensemble du territoire national à partir de 2008.
La problématique sanitaire autour des PCB est liée à la stratégie européenne de réduction de l’exposition des populations aux dioxines et composés apparentés, à l’évolution de la perception de la toxicité des PCB « NDL », c’est à dire ceux dont les effets sont différents de la dioxine. Elle a également un lien avec la directive cadre pour l’eau, puisque les PCB sont devenus un élément de la liste des substances prioritaires en 2010.
En parallèle aux analyses de poissons mises en œuvre le long du Rhône à partir de 2005-2006, des prélèvements et analyses de sédiments, notamment en surface, ont été faites dans différents secteurs, pour tenter de localiser les sources. Ces études ont conclu que la contamination des poissons trouvait son origine dans celle des sédiments, dont la mobilité pouvait aussi expliquer la distribution de la contamination dans le fleuve tout entier [2].
La relation entre la contamination des sédiments et celle des poissons est cependant complexe : l’accumulation des PCBs par les poissons peut être modulée par différents facteurs environnementaux tels que la granulométrie des sédiments, la quantité et la nature de la matière organique dans les sédiments, ou par des facteurs écologiques (habitat des poissons) ou encore physiologiques (taux de lipides des organismes notamment).
Le projet TSIP (transfert des contaminants hydrophobes du sédiment au poisson) a été conçu pour aider à mieux comprendre cette relation et la décrire à l’aide d’un modèle numérique. Plus précisément, les objectifs étaient
- identifier, pour des espèces « clé » de poissons, les voies de contamination prédominantes et les facteurs de contrôle ;
- déterminer les zones d’impact, et les tendances temporelles ;
- déterminer un niveau de PCB dans les sédiments compatible avec le niveau réglementaire (8 pg.g-1 de PCB-DL dans la chair des poissons, à l’exception des anguilles [3]).
- Idéalement, il conviendrait aussi d’estimer un temps de retour à des niveaux de contamination du poisson inférieurs à la limite réglementaire, mais en l’absence de modélisation de l’évolution des sédiments cet objectif ne peut être traité que partiellement.
[1.] AFSSA, Avis de l’Agence Française de sécurité sanitaire des aliments relatif à une demande d’appui scientifique et technique relative au risque sanitaire lié à la consommation de poissons pêchés dans le département du Rhône (zone du canal de Jonage). 2005, AFSSA: Maisons-Alfort. p. 1-2.
[2.] Babut, M. and C. Miège, Contamination des poissons et des sédiments du Rhône par les polychlorobiphényles – Synthèse des données disponibles. 2007, Cemagref: Lyon. p. 39.
[3.] E.C., Commission Regulation (EC) n° 199/2006 of 3 February 2006 amending Regulation (EC) No 466/2001 setting maximum levels for certain contaminants in foodstuffs as regards dioxins and dioxin-like PCBs. 2006, Official Journal of the European Union. p. 32/34-32/38.